De l’existence d’une pensée animale

Cheval Magazine n°433 rubrique Psychommunication – décembre 2007

Nous autres les humains avons tendance à attribuer des désirs et des intentions aux animaux que nous côtoyons régulièrement. Peut-on pour autant parler de pensée animale ? La philosophe Joëlle Proust répond aux questions de Cheval Magazine.

– Depuis quand s’intéresse-t’on à la pensée animale ?
À partir du moment où l’homme a domestiqué des animaux, on peut imaginer qu’il s’est interrogé sur l’existence d’une pensée animale. Grâce aux textes anciens, on sait que ce débat existe depuis l’Antiquité et n’a cessé depuis d’opposer les philosophes. Et le désaccord se poursuit : d’un côté, les hommes qui côtoient régulièrement les animaux, propriétaires, éleveurs ou chasseurs, qui peuvent observer des marques de raisonnement chez l’animal. Ils reconnaissent que l’animal social peut communiquer avec ses congénères et parfois avec l’homme. Il peut employer des ruses pour échapper au chasseur, et mémoriser son environnement. De l’autre, ceux qui ne sont pas familiers avec des animaux, qui associent la pensée au langage, ou tiennent à ce que l’humanité soit la seule espèce qui pense.

– Pourquoi tant de passion autour de cette question ?
Les enjeux sont nombreux. Il y a d’abord l’impact sur la question de la nature humaine. La réponse est différente si l’on admet ou pas que les autres animaux pensent. Si c’est le cas, peut-être faut-il aussi admettre d’autres points communs entre lui et les animaux. Ensuite, l’enjeu religieux : à l’exception du bouddhisme, les religions tendent à considérer que l’homme est créé par Dieu à son image et que les animaux sont créés pour être chassés et dominés par l’homme. Il y a aussi un enjeu moral : si l’animal pense et peut éprouver de la souffrance, il faut se demander si l’homme doit le défendre comme il défend les enfants ou les personnes dépendantes. Enfin, il y a un enjeu social et juridique. Faut-il reconnaître des droits aux animaux ? Leur reconnaître le droit à la vie ? Ou simplement le droit minimal au bien-être en continuant à les utiliser ou les manger pour notre plaisir ? …/…

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