Brève parue dans “Sciences Humaines” n°313 avril 2019 /
Dormir d’une seule oreille… mais laquelle ?
Dormir est-il synonyme d’être coupé totalement du monde extérieur, au point de ne plus être capable d’en détecter les alertes potentielles ? Non, selon des chercheurs français. Ils viennent de montrer que durant les phases de sommeil lent léger – jusqu’à 50 % de notre temps de sommeil total -, notre cerveau serait capable non seulement de percevoir les sons extérieurs – ce que l’on savait déjà – mais surtout de les analyser et de les trier pour n’accorder son attention qu’aux plus signifiants. En collaboration avec l’université Monash en Australie, ces chercheurs du CNRS et de l’ENS Paris ont étudié les ondes cérébrales de 24 volontaires : à chacun, à l’état d’éveil, ils ont d’abord fait écouter d’une oreille un extrait d’article ou de dialogues, et simultanément de l’autre oreille, une voix similaire récitant un flot de mots ressemblant à du français mais n’ayant aucun sens . Grâce à un électroencéphalogramme, ils ont ensuite comparé l’activité du cerveau à celle qu’ils ont pu observer, alors que leurs cobayes étaient soumis aux mêmes stimulations, auditives mais au cours d’un sommeil léger durant une sieste. Résultat : pendant le sommeil, nous sommes capables non seulement d’entendre notre environnement mais surtout de sélectionner parmi les bruits ceux qui font sens. Ce niveau de vigilance minimale permettrait au cerveau de se consacrer pleinement à sa tâche principale durant le sommeil, à savoir consolider notre mémoire, tout en restant capable de réagir en cas de danger potentiel. Toutefois, les chercheurs ont aussi découvert que cette capacité n’existe que durant quelques courtes périodes du sommeil léger. Cela expliquerait pourquoi il n’est pas toujours facile de réagir lorsqu’un réveil se déclenche au beau milieu des ronflements d’un conjoint !