Combattre les métastases

Dossier paru dans le Journal de l’Institut Curie n°136 novembre 2023 /

Lorsqu’un cancer est diagnostiqué à un stade où des métastases se sont déjà formées, il est en général associé à un mauvais pronostic. Pour les chercheurs, l’enjeu est donc de comprendre tous les mécanismes conduisant à la formation de ces tumeurs secondaires afin de mettre au point des thérapies les ciblant spécifiquement, voire d’empêcher leur formation.

Aujourd’hui on soigne plus de la moitié des patients atteints d’un cancer et l’on espère en guérir deux sur trois d’ici 2030. Derrière ces succès, une réalité plus sombre : d’après l’Institut national du Cancer (Inca) près de 90 % des décès par cancer sont dus aux métastases, ces tumeurs secondaires qui se forment à distance et empêchent les organes où elles se développent de fonctionner correctement. Au moment du diagnostic, la présence ou non de métastases est d’ailleurs un élément important pour établir un pronostic et une stratégie thérapeutique. Les métastases sont donc une cible particulière dans la lutte anticancer, il faut empêcher qu’elles ne se forment et quand elles sont déjà présentes les traiter efficacement. Et pour cela, il faut comprendre les mécanismes de leur formation. Et dans ce domaine de nombreuses découvertes ont été faites ces trente dernières années.

Des risques hétérogènes

Comme l’explique l’Inca, une métastase « n’est pas un autre cancer, mais le cancer initial qui s’est propagé. Par exemple, une métastase d’un cancer du sein installée sur un poumon est une tumeur constituée de cellules de sein ; ce n’est pas un cancer du poumon. » Il existe des cancers dont le risque de formation de tumeurs secondaires est quasi nul, c’est le cas du glioblastome, un type de cancer du cerveau, et du carcinome basocellulaire, la forme la plus fréquente de cancer de la peau. À l’inverse le mélanome a un très fort pouvoir métastatique, c’est d’ailleurs ce qui le rend si dangereux, ainsi que les cancers du sein, de la prostate, du poumon et du côlon. « Cette capacité ou non à former des métastases est encore mal comprise, elle dépend de nombreux facteurs, et notamment des caractéristiques initiales des cellules à partir desquelles la tumeur primaire se développe », explique Julien Ablain, responsable de l’équipe Adhésion et signalisation dans le mélanome métastatique au Centre de recherche contre le cancer de Lyon (CRCL). Par ailleurs, la capacité métastatique n’est pas inhérente à toute cellule tumorale. Dès les années 1970, il a été montré que si on injecte des cellules cancéreuses dans un modèle murin de mélanome, moins de 0,1 % d’entre elles survivent au-delà de 24 heures et seulement 0,02 % parviennent à former des métastases détectables. « Inversement, de plus en plus d’études montrent que certaines tumeurs se disséminent efficacement même avant d’avoir un caractère malin », signale Julien Ablain.

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