Cheval Magazine n°460 rubrique Comportement -mars 2010
Depuis quelques années les chercheurs s’intéressent aux bases génétiques du comportement équin. Des questions se posent alors à propos des liens entre races et comportement et à la sélection opérée par l’homme. Mais les réponses ne sont pas si évidentes qu’il n’y paraît.
« Le Haflinger est docile, le Camargue courageux, le pur sang arabe délicat… » Ce genre de considération sur le caractère de telle ou telle race s’entend très fréquemment dans les écuries, c’est même un argument de vente important pour bon nombre d’éleveurs et d’associations de races. Mais derrière ce constat plutôt empirique, existe-t’il réellement des traits de caractères qui puissent définir certaines races par rapport à d’autres ? On aurait tendance à la croire. Depuis que l’homme élève des chevaux et a « créé » de multitudes races pour les usages d’alors (travail agricole, traction de véhicules, cavalerie…), on peut facilement imaginer que le caractère ait fait partie des critères de sélection. Mais à regarder de plus près, les choses sont bien moins évidentes que cela. En effet, si la plupart des éleveurs déclarent à qui veut l’entendre que le tempérament d’un cheval est pour eux un critère primordial, en réalité rares sont les races pour lesquelles le programme de sélection officiel intègre des critères objectifs quant au caractère.
Bases génétiques du comportement
À l’heure du décryptage du génome du cheval, il faut reconnaître que les connaissances scientifiques portant sur le déterminisme génétique du comportement sont bien maigres. Depuis une dizaine d’années, des études ont été menées pour préciser cela. Les chercheurs ont comparé de nombreuses races et lignées pour essayer de déterminer ce qui pouvait ou non être sous le contrôle des gènes. Mais cela reste difficile chez le cheval, d’une part parce qu’il faudrait examiner un très grand nombre d’individus, d’autre part parce qu’il existe une vaste variété de conditions environnementales (mode d’élevage, mode de débourrage et de dressage, alimentation…) qui influence les tempéraments.
Il faut bien reconnaître que si certains éleveurs ont mis en place un mode de sélection qui tient compte du comportement des chevaux, la plupart des méthodes reste assez empirique et intuitive. Dans la très grande majorité, les tests utilisés portent avant tout sur l’émotivité du cheval, c’est-à-dire ses réactions face à la soudaineté et/ou la nouveauté, et ses capacités d’apprentissage. Pourtant, nous n’avons aujourd’hui aucune certitude quant à l’éventuelle hérédité génétique de ces comportements.
Observation et expérimentation
Deux éthologistes ont particulièrement travaillé sur cette notion de base génétique des comportements : Katherine Houpt de l’Université Cornell dans l’état de New York (Etats-Unis) et Martine Hausberger, de l’Université de Rennes I. Elles dressent régulièrement des synthèses des connaissances. D’après les dernières en date, on constate par exemple qu’il existe des différences entre races au niveau du comportement maternel : ainsi il y a plus de cas de rejet du poulain chez les juments arabes que chez les Quarter, les Paint ou les pur-sang par exemple. Dans un autre domaine, les pur-sang et les arabes sont plus sujets aux tics que les trotteurs ou les races de selle. Une étude menée en 1996 par M. Hausberger à l’ENE de Saumur a aussi montré que, dans des conditions de vie équivalentes, les anglo-arabes présentent d’avantage de tics et passent plus de temps à dormir au box que des selles français. C’est d’autant plus vrai quand les deux parents sont eux aussi anglo-arabes ou que le cheval a une proportion importante de sang pur-sang…/…