Magazine Profession Sage-femme décembre 2014 – rubrique maïeutique pratique /
Ces dernières années, le don de sang placentaire (ou sang de cordon ombilical) a été fortement encouragé par les autorités sanitaires. De nombreuses maternités s’y sont mises, investissant du temps et du personnel, afin d’alimenter les banques publiques de sang de cordon. Mais cette organisation va être profondément modifiée dans les mois à venir.
Longtemps considéré comme déchet hospitalier, le cordon ombilical a changé de statut en 2011, lors de la révision des lois de bioéthique. Désormais il est considéré comme les autres tissus, cellules et produits du corps humain, c’est à dire un apport précieux pour les greffes et pour la recherche. Il contient en effet des cellules souches hématopoïétiques (CSH), qui constituent une stratégie thérapeutique majeure pour traiter les cancers du sang. Le plus souvent, on traite ces pathologies avec des cellules souches prélevées dans la moelle osseuse ou le sang périphérique, mais en 1988, une Française, le Pr Éliane Gluckman de l’hôpital Saint Louis (Paris), montre pour la première fois au monde que c’est aussi possible avec une greffe de sang de cordon ombilical. Depuis dans le monde, plus de 20 000 patients ont été soignés ainsi, et cela continue de se développer.
Les maternités, clé de voûte du prélèvement
Le sang placentaire présente trois avantages majeurs :
– une probabilité supérieure de trouver un donneur : il est possible de greffer des CSH issues de sang placentaire ayant une moindre compatibilité HLA* avec le receveur que lors d’une greffe de moelle osseuse, et ce sans augmenter le risque immunologique (la plupart des greffes de sang placentaire sont réalisées justement parce qu’on n’a pas trouvé de donneur de moelle compatible).
– la disponibilité : la possibilité de stocker les poches de sang placentaire dans des banques permet une mise à disposition rapide, à l’inverse d’un don de moelle où l’organisation prend en moyenne 3 à 4 semaines.
– les résultats : en terme de survie des malades et de qualité de vie, ils sont similaires à ceux obtenus avec des CSH prélevées chez un adulte.
De fait s’est développée en France une activité reposant sur deux acteurs essentiels : les maternités, où sont effectuées les prélèvements, et les banques de sang de cordon qui valident, conditionnent et stockent les greffons de sang placentaire. Dans le public, cette activité répond en général à une sollicitation des autorités sanitaires mais aussi à une volonté en interne : « Nous avons démarré fin 2008, à la demande de l’Établissement Français du Sang et à l’initiative de notre chef de service le Pr Gaucherand, témoigne Anne-Gaëlle Blanchard, sage-femme à l’Hôpital Femme Mère Enfant de Bron (Rhône). Nous étions alors les premiers en Rhône-Alpes. » En parallèle l’activité s’est aussi développée dans le privé. « La Fondation Générale de santé s’est mobilisée depuis plusieurs années sur ce sujet. À sa demande, nous avons démarré l’activité en 2009 », raconte Corinne Gaulard, sage-femme réfèrente pour cette activité la clinique Sainte Marthe de Dijon (Côte d’Or), propriété du groupe Générale de Santé.
Former et informer
La formation des sages-femmes au geste de prélèvement s’effectue essentiellement par les paires. « La première sage-femme a été formée par quelqu’un de l’Établissement Français du Sang. C’est elle qui m’a ensuite montré les gestes à effectuer et le déroulement des entretiens avec les mères. Et à mon tour, je forme toutes les sages-femmes qui intègrent notre service », décrit la lyonnaise Anne-Gaëlle Blanchard. À la maternité Ste Marthe, c’est la Fondation Générale de Santé elle-même qui s’en est chargée : « Lors d’une journée de formation théorique, nous avons rencontré des hématologues qui nous ont parlé des cellules souches, les fabricants du kit de prélèvement et une sage-femme de la banque de sang placentaire de Besançon. Cette dernière est ensuite venue dans la maternité former deux d’entre nous, ensuite nous avons montré aux autres comment faire », explique Corinne Gaulard. Certaines maternités forment aussi les gynécologues-obstétriciens. D’ailleurs, « chez nous, les personnes qui gèrent l’accouchement, sage-femme ou gynécologue-obstétricien, effectuent tous le prélèvement de sang de cordon », précise Marjorie Grégoire, sage-femme dans la maternité privée de l’Institut Hospitalier Franco-Britannique de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine).