Dossier paru dans le Journal de l’Institut Curie n°129 en février 2022 /
En associant simultanément différentes approches thérapeutiques anticancers, des résultats importants ont été obtenus ces cinquante dernières années. Avec l’apparition récente des thérapies ciblées puis de l’immunothérapie, de nouvelles associations sont envisagées, et bouleversent notamment la prise en charge des cancers les plus avancés.
L’arsenal thérapeutique contre le cancer est très développé. Il y a les désormais classiques chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie. Et plus récemment sont apparues l’hormonothérapie, qui réduit ou stoppe l’activité ou la production d’une hormone susceptible de stimuler la croissance des tumeurs hormono-dépendantes ; les thérapies ciblées, qui bloquent la croissance ou la propagation des cellules tumorales en interférant précisément avec des particularités moléculaires à l’origine de leur développement ou de leur dissémination ; et l’immunothérapie, dont l’objectif est de rétablir ou stimuler le fonctionnement du système immunitaire du patient pour qu’il s’attaque plus efficacement aux cellules cancéreuses. Si l’on a souvent en tête qu’une thérapie succède à une autre pour traiter le plus efficacement possible la maladie, il est certain que ces thérapies sont aussi envisagées de façon simultanée : on parle alors d’associations de traitements, qui associent des approches différentes ou des médicaments de la même classe thérapeutique.
Sur plusieurs fronts à la fois
« Face à certaines tumeurs, on est plus efficace si on les attaque en ciblant différents mécanismes en même temps plutôt que l’un après l’autre », résume le Pr Charles Dumontet, directeur-adjoint du Laboratoire de recherche en cancérologie de Lyon (CRCL). Un peu comme lorsqu’une armée mène une bataille sur le front aérien et terrestre en même temps. « Cette approche est pertinente car une tumeur cancéreuse n’est pas une masse homogène. Elle est constituée de cellules aux caractéristiques différentes, et qui ne réagissent pas toutes de la même façon à un médicament par exemple. Certaines y seront sensibles, d’autres pas. Or en traitant de façon séquentielle, on prend parfois le risque que se développe des mécanismes de résistance aux traitements », poursuit le chercheur lyonnais. Dans les années 1970, on a commencé par utiliser des chimiothérapies en association. Ainsi pour les cancers des testicules métastatiques par exemple, le protocole standard aujourd’hui associe trois chimiothérapies simultanément.
Augmenter les taux de guérison et/ou la survie
L’un des exemples emblématiques de l’intérêt de ces associations est le lymphome non Hodgkinien, un cancer du sang qui s’attaque au système immunitaire. En 1975 a été mis au point le protocole CHOP qui associait trois chimiothérapies conventionnelles avec de la cortisone. Il a permis de rendre curable ce cancer chez une partie des patients. Puis en 1995, une thérapie ciblée a été ajoutée à cette association : le rituximab qui vise certaines cellules immunitaires impliquées dans la cancérisation. « Ce nouveau protocole dit R-CHOP a permis d’augmenter le taux de guérison parmi les patients non curables jusqu’à alors, raconte le Pr Dumontet. Et aujourd’hui on réfléchit à associer d’autres thérapies ciblées à ce cocktail pour être encore plus efficace ! »
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