Dossier sur la dépression paru dans Recherche & Santé n°132
La revue de la Fondation pour la Recherche Médicale – octobre 2012
EXTRAIT :
La dépression est un vrai problème de santé publique au point que certains n’hésitent pas à parler d’épidémie mondiale. Avec le développement de nouveaux médicaments antidépresseurs mais aussi des psychothérapies et approches cognitives et comportementales, l’arsenal thérapeutique s’est pourtant étoffé. Mais il reste beaucoup à faire pour comprendre les mécanismes biologiques et psychiques de cette maladie et tenter d’attaquer le mal à sa source.
Comme l’hypertension ou le cancer, la dépression est une maladie. Une maladie qui peut devenir chronique et invalidante, mais aussi une maladie qui se soigne et pour laquelle la recherche a permis de réels progrès. L’épisode dépressif majeur est un trouble de l’humeur qui se traduit par une perte de motivation ou d’élan vital, une perte de l’estime et de la confiance en soi, une tristesse intense. Ce n’est ni une fatalité ni une faiblesse de caractère. Il faut la distinguer d’une déprime, un coup de blues passager, en particulier lors d’évènements négatifs. Les critères pour en juger : une souffrance psychique quasi permanente et durable qui entrave la vie quotidienne.
Environ 15 % de la population souffre au moins une fois dans sa vie de dépression. Le risque augmente avec la précarité, le vieillissement ou encore la solitude. C’est une cause très importante de morbidité. En France, cela représente 3 millions des 15-75 ans chaque année. Les enquêtes révèlent qu’une personne sur deux n’est pas correctement diagnostiquée et soignée.
De nombreux troubles associés
« De nombreuses manifestations peuvent attirer l’attention : difficulté à se concentrer, troubles du sommeil (cela concerne 60% des dépressifs : 80% sont insomniaques, 15% hypersomniaques), anorexie, angoisse, troubles de la libido… avec un retentissement dans les relations humaines, la scolarité, le travail, ainsi que la santé générale », résume le Pr Jean-Pierre Olié, psychiatre à l’hôpital Ste Anne (Paris).
Il peut s’agir d’un épisode dépressif réactionnaire, qui survient en général 4 à 6 mois après un évènement pénible (décès, perte d’emploi, crise familiale…) ou une situation exigeant une adaptation importante (changement de vie, de travail…) ou secondaire à un trouble hormonal (dérèglement de la thyroïde, suite d’accouchement…) ou une maladie (AVC, Parkinson…) Enfin « la dépression dite endogène, c’est à dire sans facteur déclenchant manifeste, qui révèle l’existence d’une dimension individuelle de vulnérabilité face à cette maladie », souligne le Pr Olié. En général, l’épisode dépressif dure 6 à 10 mois. Dans 20 % des cas, il disparaît spontanément. Mais « comme pour le cancer, on préfère parler de rémission que de guérison, car il y peut rester des symptômes cicactriciels, qui seront à l’origine dans 50 % des cas d’une récidive. Et chez un patient sur cinq, cela peut même devenir chronique. »