Cheval Magazine n°533 – avril 2016 /
Aux yeux du public, le retour des chevaux pour labourer les champs ou débarder les forêts ressemble parfois à une lubie passéiste, une pratique un peu folklorique de certains écologistes… Mais pense-t-on la même chose lorsqu’on voit s’ériger des champs d’éoliennes, héritières de nos moulins, ou que l’on remet à l’honneur la force hydraulique ? Non ! Et tout le monde s’accorde sur l’indispensable nécessité de se tourner vers des énergies « propres ». Alors pourquoi le cheval n’est-il pas considéré lui aussi comme une énergie renouvelable ? Alors qu’il l’est à plus d’un titre : par sa force mécanique d’abord, mais aussi, et c’est plus étonnant, à travers la valorisation de ses crottins.
Le cheval comme maître étalon
Pendant des siècles, le cheval a été une source majeure d’énergie pour les activités humaines, et notamment pour la traction. Lorsque sont apparues les premières machines à vapeur, il est tout naturellement devenu la référence pour mesurer la puissance d’un attelage. C’est James Watt, qui a permis à ces machines de devenir le moteur de la Révolution industrielle, qui invente la notion de cheval-vapeur (ou CV). À la suite d’essais qu’il réalisa en 1783 avec des chevaux de trait, il fixa le cheval-vapeur comme la puissance nécessaire pour soulever une masse de 75 kg sur une hauteur d’un mètre en une seconde (soit 736 watts). Aujourd’hui encore la puissance du moteur d’une voiture est mesurée en chevaux-vapeur !
La traction animale se cherche un avenir
Depuis quelques années, les chevaux reprennent du service : les agriculteurs, les vignerons et les professionnels de la forêt (re)découvrent les avantages de l’animal. Il revient même en ville, pour le transport scolaire, l’entretien des espaces verts ou le ramassage des ordures. De nombreuses études1 ont synthétisé les intérêts de la traction hippomobile moderne. Mais cette filière a du mal à pérenniser son avenir. Une des explications se trouvent peut-être dans les actes du colloque L’énergie cheval : du phénomène marginal à la réalité économique2 : « contrairement aux autres sources d’énergie utilisées actuellement, l’énergie animale ne peut être ni produite à grande échelle, ni conservée, ni transportée. L’animal producteur d’énergie et les personnes qui s’en servent constituent une entité inséparable. Par conséquent l’énergie animale est la seule qui restera toujours à échelle humaine. »
Au niveau européen, la puissance du cheval n’est toujours pas reconnue comme énergie renouvelable. De nombreux acteurs se battent pourtant pour cette reconnaissance, comme Jean-Louis Cannelle, président du CERRTA (Centre européen de ressources et de recherches en traction animale). On peut même lire dans une synthèse3 réalisée par l’IFCE qu’une « étude menée par l’ADEME a montré qu’un cheval occupé à la collecte des déchets émettait 35% de CO2 en moins par rapport à un système motorisé. De plus, le transport hippomobile utilise une énergie renouvelable, dont les déchets peuvent être réutilisés ».
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