Cheval magazine n°451 rubrique Comportement – juin 2009
EXTRAITS :
→ Le regroupement par derrière
À la manière d’un chien de berger, l’étalon regroupe ses juments lorsqu’un danger ou une menace se fait ressentir, ou simplement lorsque l’une d’entre elle s’éloigne un peu trop. Il baisse la tête, oreilles couchées en arrière, étend son encolure vers le sol et balance la tête de droite à gauche en passant derrière les juments et leurs poulains pour les inciter à se regrouper. Ce comportement est aussi appelé herding (du verbe anglais to herd qui signifie rassembler, constituer un troupeau) ou snaking à cause des mouvements de tête qui ressemblent à ceux d’un serpent (snake en anglais). Il peut arriver que l’étalon morde les jarrets de la jument qu’il tente de guider si elle n’obtempère pas. Ce comportement s’observe parfois chez des juments, envers leurs poulains, ou bien chez un hongre qui souhaite éloigner un autre cheval, mais c’est plutôt rare.
→ Le marquage
Les chevaux ne font pas leur crottin n’importe où. En général, ils les regroupent dans un endroit où ils n’iront pas brouter. On appelle ça des zones d’évitement. C’est une méthode instinctive pour se protéger contre le surparasitisme. Quand un étalon se trouve face au tas de crottin d’un autre individu mâle ou femelle, il adopte un comportement typique : d’abord il renifle le crottin ou l’urine, sa manière de se renseigner sur l’identité de celui qui l’a produit et éventuellement de son état physiologique (voir flehmen), puis il le recouvre par sa propre urine ou défèque à son tour dessus. Ensuite il renifle à nouveau et peut ainsi renouveler plusieurs fois ce comportement. Il ne s’agit pas à proprement dit d’un marquage territorial, mais c’est une façon pour un étalon d’affirmer sa supériorité face à un autre étalon, ou bien de masquer le crottin de ses juments (et ainsi dissimuler le fait qu’elles soient éventuellement en chaleur) pour qu’un autre étalon n’ait pas envie de les approcher.
→ Jauger l’adversaire
C’est durant les nombreuses heures de jeu dans son enfance, puis sa vie de mâle célibataire vivant en groupe avec d’autres jeunes mâles que l’étalon forge son comportement. Jeux et simulacres de combat servent en quelque sorte de séances d’entraînement. Plus tard, à l’âge adulte, les seules relations qui existent entre étalons vivant à l’état sauvage, se résument à une compétition pour avoir accès aux femelles en âge de se reproduire. Lorsque deux étalons se croisent, ils commencent d’abord par jauger l’adversaire et tenter de l’impressionner en adoptant une position caractéristique : tête haute, encolure arquée, queue relevée, corps compact, allure ample, le trot se mue en passage voire en piaffer. Cette attitude naturelle correspond au rassemblé, tant recherché en équitation classique. Ce comportement peut être interrompu par quelques séances de marquage ou de grattage du sol avec les antérieurs.
→ Le combat
En général, moins il y a de préliminaires (marquage, posture d’intimidation…) et plus le combat risque d’être violent. Après s’être jaugé en gardant leur distance, les étalons s’approchent, se reniflent en donnant éventuellement quelques coups d’antérieurs au niveau du poitrail et poussent des hennissements aigues. La tension monte ! L’une des meilleures armes du cheval, c’est son poids. Les étalons se cabrent et tentent de frapper l’autre avec les antérieurs à la manière de deux boxeurs. Oreilles en arrière, ils se mordent au niveau de l’encolure ou des jarrets, se bousculent pour essayer de faire tomber l’autre. Leurs corps sont parfois intriqués l’un dans l’autre de sorte qu’ils chutent ensemble. Les morsures sont très fréquentes et l’on constate facilement qu’un étalon sauvage porte des cicatrices de ses combats sur l’ensemble de son corps. Les combats entre mâles peuvent être très courts et s’arrêter rapidement lorsque l’un capitule spontanément, mais ils peuvent aussi durer, interrompus par des séances de marquages, tout cela dans la plus totale indifférence de la part des femelles.
→ Le toilettage mutuel
Les séances de pansage mutuel sont très fréquentes chez les chevaux. C’est évidemment un bon moyen de se faire gratter le dos par un autre, mais c’est aussi un comportement essentiel qui permet d’établir des liens sociaux entre les chevaux et d’atténuer le stress. En général, seuls les animaux qui s’entendent bien ou qui ont un rang hiérarchique proche acceptent de se gratter mutuellement. Mais alors avec qui l’étalon se toilette t’il ? Le plus souvent il s’agit de juments haut placées dans la hiérarchie du groupe. C’est aussi un bon moyen pour lui de faire sa cour aux juments lorsqu’elles sont en chaleur et d’apaiser le stress des moins expérimentées. Parfois, il arrive qu’un subordonné approche l’étalon et se mette à le toiletter, comme un signe de soumission. Dans ce cas l’étalon ne répond, se laisse faire et décide seul de mettre un terme à cette activité.
→ Le flehmen
C’est là encore une des attitudes caractéristiques de l’étalon : tête levée bien en l’air, naseaux grands ouverts et surtout la lèvre supérieure retroussée, il hume le fond de l’air. En réalité cette position lui permet de faire pénétrer l’air dans un organe particulier appelé voméronasal (ou organe de Jacobson) qui se situe en arrière des fausses nasales. C’est un organe spécialisé dans la détection des phéromones, ces signaux chimiques volatiles qui renseignent sur l’état physiologique d’un individu. Pour l’étalon, il s’agit avant tout de détecter s’il y a dans les parages des juments en chaleur. Cependant on observe parfois des juments et même des hongres adopter cette attitude.
→ Parade et copulation
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, c’est bien souvent la jument qui prend l’initiative d’approcher l’étalon lorsqu’elle est en période fertile. Par des séances de toilettage mutuel, elle lui fait comprendre qu’elle est disponible pour des choses plus sérieuses ! Elle urine souvent, et les phéromones contenues dans cette urine vont permettre au mâle de percevoir qu’elle est en chaleur. Elle balance ostensiblement son arrière train devant lui. Il manifeste alors un certain intérêt, renifle les flans et les organes génitaux de la jument. Puis commence un doux ballet entre les deux : ils s’approchent, se repoussent, l’étalon tente de monter la jument, elle esquisse un refus puis revient le solliciter en urinant. L’étalon lèche parfois la jument, encense et multiplie les flehmens. Les hennissements sont nombreux et variés. Lorsqu’il la monte enfin, il ne parvient pas toujours à la pénétrer dès la première fois. Plusieurs essais sont parfois nécessaires avant la véritable copulation qui dure en moyenne qu’une vingtaine de secondes.
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