Dossier sur les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin
paru dans Recherche & Santé n°128
La revue de la Fondation pour la Recherche Médicale – avril 2011
Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin ont un parcours difficile : souvent dissimulées par les malades, honteux de leurs symptômes, parfois encore ignorées par la médecine de ville, difficilement prises en charge jusqu’à une date récente. Heureusement, l’arrivée de nouveaux médicaments et le développement de la recherche a de quoi redonner de l’espoir.
Douleurs abdominales, diarrhée ou constipation, envies répétées d’aller aux toilettes, ballonnement, gaz, fatigue générale… Ces symptômes, lorsqu’ils sont passagers, font partie des petits désagréments que nous ressentons de temps à temps. Mais pour d’autres, ils font partie intégrante du quotidien et représentent alors une sérieuse atteinte de la qualité de vie. Il est alors question de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, ou MICI, des maladies invalidantes qui peuvent avoir des conséquences importantes sur l’état général. Plus ou moins liées à notre mode de vie occidental, ces MICI sont de plus en plus étudiées par la recherche. À cause de l’inflammation chronique et des mécanismes immunitaires qu’elles mettent en jeu, elles ressemblent en effet à d’autres maux modernes comme la polyarthrite rhumatoïde, le psoriasis ou la sclérose en plaques. De fait, elles bénéficient comme ces dernières des récentes avancées dans le domaine de la biothérapie.
Une paroi digestive dégradée
« Les deux principales MICI sont la maladie de Crohn et la recto-colite hémorragique (RCH), qui se caractérisent par des zones d’inflammation chronique de la paroi digestive. Des phases d’activité d’intensité variable, appelées poussées, alternent avec des périodes de rémission. Elles concerneraient chacune une personne sur 1000 en France », décrit le Pr Franck Carbonnel, de l’hôpital Bicêtre (Val de Marne). Les MICI peuvent être diagnostiquées à tout âge de la vie mais on constate un pic d’incidence entre 20 et 30 ans (voir encadré 1). Schématiquement, on considère qu’un tiers des malades a des poussées modestes, un tiers a des poussées un peu plus importantes et le dernier tiers ne connait jamais de rémission. Ce sont chez les adolescents, que l’on retrouve les formes les plus sévères et les plus évolutives. Dans ce cas, le retentissement sur la croissance est important.
« Dans la maladie de Crohn, n’importe quelle segment du tube digestif, de la bouche à l’anus, peut être touchée. Mais le plus souvent il s’agit de la partie terminale de l’intestin grêle et du colon. Les lésions inflammatoires sont plus profondes et peuvent être à l’origine d’occlusion ou de perforation, explique le Pr Carbonnel. Dans le cas de la RCH, les lésions sont plus superficielles et exclusivement situées au niveau du colon et du rectum. Elles provoquent des hémorragies d’où la présence de sang dans les selles. »